Pic d’exécutions critiqué en Iran
Normes internationales
La Campagne internationale pour les droits de l’Homme en Iran a recensé 121 exécutions en six semaines, sans compter les pendaisons secrètes qui ont lieu régulièrement dans les prisons iraniennes. En 2009, Amnesty International avait compté 388 exécutions pour toute l’année (les statistiques 2010 ne sont pas encore disponibles).
Mahmood Amiry-Moghaddam, de l’organisation membre de la Coalition mondiale Iran Human Rights, estime que « la raison de l’augmentation du nombre d’exécutions est probablement le besoin pour les autorités iraniennes de faire régner plus que jamais la peur dans la population ».
Il évoque le risque de manifestations contre le régime alors la situation économique se détériore du fait de réformes récentes qui ont conduit à « une forte augmentation des prix » en période de « hausse du chômage ».
Ce n’est pas la première fois que la peine de mort sert à museler l’opposition politique en Iran. Selon le rapport 2009 d’Amnesty International, 112 exécutions ont été enregistrées entre l’élection présidentielle le 12 juin 2009 et le début du deuxième mandat de Mahmoud Ahmadinejad le 5 août.
Amiry-Moghaddam affirme que « la société civile iranienne (qui est maintenant majoritairement clandestine ou en exil) a tenté d’attirer l’attention sur ces exécutions. Nous avons organisé plusieurs manifestations dans le monde. Il y a également eu des rassemblements en Afghanistan et au Kurdistan irakien devant les ambassades iraniennes. Nous allons continuer dans les semaines à venir. »
Violation du droit international
Human Rights Watch, également membre de la Coalition mondiale, a documenté des manquements aux standards minimum de protection reconnus internationalement aux personnes passibles de la peine de mort. Des personnes ont avoué sous la torture, se sont vus refuser l’accès à un avocat et ont subi des procès sommaires. Des mineurs sont condamnés à mort.
L’adolescent Ashkan Miri a été condamné à mort début février pour la mort accidentelle d’un autre mineur dans une bagarre. Ashkan avait 14 ans au moment des faits.
L’Iran a ratifié le Pacte international sur les droits civils et politiques (PIDCP) et doit donc respecter son article 6, qui restreint l’utilisation de la peine de mort pour les crimes les plus graves. La définition de cette expression acceptée au niveau international désigne les crimes entraînant la mort d’autrui.
Cependant, la majorité des personnes exécutées en Iran le sont pour d’autres infractions. Le ministère des Affaires étrangères iranien a déclaré que 80% des pendaisons concernaient des trafiquants de drogue. Au moins un homme a été exécuté pour apostasie et 13 personnes pour moharebeh (« hostilité envers Dieu »).
Pression internationale
La communauté internationale a mis du temps à réagir à cette vague d’exécutions iraniennes. Selon Amiry-Moghaddam, cela a donné au régime iranien l’impression « qu’il pouvait probablement continuer [les exécutions] ».
Plus récemment, la pression internationale s’est toutefois accentuée et l’exécution de la Néerlandaise Zahra Bahrami a tout particulièrement attiré l’attention. Bahrami était condamnée pour trafic de drogue et les Pays-Bas ont interrompu leurs relations diplomatiques avec l’Iran après son exécution en janvier.
Le Haut commissaire des Nations unies pour les droits de l’Homme Navi Pillay et Catherine Ashton, la représentante de l’Union européenne pour la politique étrangère, ont appelé à un moratoire immédiat sur les exécutions à la suite du procès opaque et inéquitable de Bahrami.
Le Rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Christof Heyns, et le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats Gabriela Knaul ont appelé l’Iran à « déclarer immédiatement un moratoire sur la peine de mort vu la gravité de la situation et la violation régulière des garanties de procédure équitable ».
Le porte-parole du Département d’Etat américain, Philip Crowley, a demandé à l’Iran de suspendre les exécutions en soulignant que « l’exécution [de Bahrami] figure parmi les dizaines auxquelles il a été procédé ces dernières semaines sur fond d’interrogations sur les motivations du gouvernement iranien et sur le respect des droits de ces prisonniers aux termes du Pacte international sur les droits civiques et politiques ».
Les Etats-Unis ont exécutés des criminels mineurs jusqu’en 2005 en violation du PIDCP.