Un forum pour se rassembler contre la peine de mort

Gouvernance

le 4 juillet 2008

L’évènement – qui offre l’une des rares opportunités, pour les abolitionnistes du monde entier, de se rencontrer – a rassemblé des membres de la Coalition originaires du monde entier.
La session de l’après-midi était ouverte à tous les participants du Forum mondial: plus de 80 personnes sont venues assister aux présentations et participer aux débats sur l’évolution du combat abolitionniste au niveau mondial.
Une discussion passionnée s’est engagée sur le thème de la responsabilité des entreprises. Les organisations abolitionnistes devraient-elles faire du lobbying pour que l’usage de la peine de mort fasse partie des critères étudiés par les grandes firmes lorsqu’elles souhaitent investir dans de nouveaux pays ?

Entreprises socialement responsables: un pari risqué

Selon Elizabeth Zitrin, avocate américaine et militante de Death Penalty Focus, “l’argent peut être un aiguillon là où échoue la morale”. Elle a notamment cité l’exemple du régime d’apartheid en Afrique du Sud, où les militants ont convaincu les entreprises de ne pas investir dans le pays.
Le professeur de droit américain et membre de la National Association of Criminal Defence Lawyers Speedy Rice a avancé que le monde des affaires détient plus de pouvoir que les gouvernements et devrait être associé à la lutte contre la peine de mort. Selon lui, une campagne en faveur de l’investissement socialement responsable pourrait être utile envers les entreprises européennes qui investissent aux États-Unis.
Toutefois, Piers Bannister, expert sur la peine de mort auprès du secrétariat international d’Amnesty International, a mis en garde son auditoire sur le risque de s’investir dans une campagne qui pourrait être mal interprétée. “Quelqu’un peut interpréter votre message comme: “Vous pratiquez la peine de mort, donc vous ne valez pas la peine de vous voir confier un travail”. Dès cet instant, les destinataires de la campagne deviendront hostiles et n’écouteront pas vos arguments contre la peine de mort”, a-t-il déclaré.
Finalement, un petit groupe de membres a décidé d’étudier plus en détails l’opportunité, pour la Coalition mondiale, d’entreprendre une action dans le domaine de l’investissement socialement responsable.
 
 
Au cours d’une discussion sur le rôle des collectivités locales dans la lutte pour l’abolition, l’ancien président du conseil régional de Toscane, Angelo Passaleva, a détaillé l’éventail d’activités qu’une région peut entreprendre contre la peine de mort, notamment à l’attention des jeunes publics. À l’échelle de la seule Toscane, 6000 étudiants ont par exemple vu le spectacle itinérant Pas en mon nom.
Mario Marazziti, porte-parole de la Communauté de Sant’Egidio, a présenté à l’assemblée l’évènement Villes pour la vie-Villes contre la peine de mort. Ce dernier rassemble des centaines de villes qui illuminent leurs monuments le 30 novembre de chaque année. Il a souligné que, lorsqu’un évènement abolitionniste est organisé par une autorité locale, “on sent immédiatement que l’on fait partie du mouvement.”
Plusieurs membres de la Coalition ont également profité de l’Assemblée générale pour présenter leurs activités et leurs projets. Parmi eux, Carmelo Campos Cruz de la Coalition Portoricaine contre la peine de mort, a détaillé ses projets pour rassembler les abolitionnistes des Caraïbes au sein d’une coalition régionale: le Réseau des Abolitionnistes Caribéens devrait voir le jour et être opérationnel d’ici deux ans.

Les nouvelles du monde ont continué à arriver avec Mostapha Znaidi de la Coalition marocaine contre la peine de mort, qui a dénoncé l’“incohérence” entre les annonces du gouvernement et les progrès actuels vers l’abolition dans son pays.
Renny Cushing de Muder Victims’ Families for Human Rights a quant à lui donné quelques “bonnes nouvelles” des États-Unis, où le nombre de condamnations à mort diminue. Il a également affirmé que les études d’opinion menées par son organisation montrent l’importance d’offrir des “alternatives” à la peine de mort plutôt que simplement “l’abolition” pour gagner le soutien des citoyens américains.
Dans son discours de clôture, Jacques Auxiette, président de la région Pays de Loire qui accueillait le forum, a déclaré que l’évolution des mentalités envers la peine de mort est un travail long et fastidieux. Il a rappelé que Robert Badinter était très impopulaire dans les années 1980 lorsque, alors ministre de la Justice français, il a obtenu l’abolition de la peine de mort. Il est maintenant reconnu et respecté internationalement pour ce succès.

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