La peine de mort est-elle un châtiment cruel, inhumain ou dégradant en droit international?
Normes internationales
Le rapporteur spécial Manfred Nowak (photo) a soulevé la question au Conseil des droits de l’Homme de l’Onu, déclenchant en débat dans lequel les membres de la Coalition mondiale ont eu leur mot à dire.[/fr][en]Special Rapporteur Manfred Nowak (photo) raised the issue at the UN’s Human Rights Council, triggering a debate in which World Coalition member organisations had their say.[/en]
[fr]Le rapporteur spécial des Nations-Unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Manfred Nowak, a fait des vagues lors de la 10e session du Conseil des droits de l’Homme de l’Onu en rendant un rapport recommandant d’enquêter sur la possibilité que la peine de mort soit un châtiment cruel, inhumain ou dégradant.
« Les différentes constatations auxquelles sont arrivés le Comité des droits de l’homme et d’autres autorités aux prises avec la question de la compatibilité de la détention dans les quartiers des condamnés à mort et des différentes méthodes d’exécution avec le droit de ne pas être soumis à un traitement cruel, inhumain ou dégradant laissent entrevoir la nécessité d’adopter une vision différente et plus fondamentale du problème », a-t-il écrit.
Un parallèle entre la peine de mort et les châtiments corporels
Le rapport établit un parallèle avec les châtiments corporels, jugés acceptables il y a quelques décennies et maintenant interdits en droit international.
Tout en reconnaissant que la peine de mort n’est pas actuellement interdite par les traités internationaux, il a recommandé qu’un « étude juridique plus complète » soit menée pour prendre en compte les interprétations modernes du droit.
« J’ai proposé d’interpréter la peine de mort à la lumière de la compréhension actuelle de ce qu’est un "traitement ou un châtiment cruel, inhumain ou dégradant" », a expliqué Manfred Nowak en présentant son rapport le 12 mars 2009, ajoutant que cette notion « a évolué ».
Deux membres de la Coalition mondiale ayant le statut d’observateur à l’Onu ont salué le rapport. S’exprimant au nom de la Coalition mondiale, la Fédération internationale de l’ACAT (FIACAT) a déclaré que la peine de mort « devrait être interdite en droit international et combattue par tous les moyens ». Elle a encouragé le Conseil des droits de l’Homme a lancer l’étude juridique exhaustive proposée par le rapporteur (voir la vidéo).
Plusieurs organisations membres de la Coalitions mondiale (Penal Reform International, National Coalition for the Abolition of the Death Penalty, National Association of Criminal Lawyers and Murder Victims’ Families for Human Rights) ont co-signé cette déclaration.
Dans une déclaration commune délivrée pendant le dialogue interactif avec le rapporteur, l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la FIACAT ont par ailleurs affirmé que la Coalition mondiale « considère la peine capitale comme une forme de châtiment cruel, inhumain et dégradant » (voir la vidéo en anglais).
L’Egypte en tête des critiques
Cependant, plusieurs Etats rétentionnistes ont réagit brutalement au rapport. « Le rapporteur n’avait aucun mandat pour travailler sur la peine de mort », a déclaré le délégué égyptien Amr Roshdy Hassan. Il a demandé un vote sur le chapitre du rapport concernant la peine capitale.
« Ces rapports sont habituellement adoptés par consensus », explique Nathalie Jeannin, chargée de programme Onu de la FIACAT à Genève. « Va-t-il y avoir assez de négociations pour que ce soit le cas ? Vont-ils demander un vote en séance ? Nous verrons les 26 et 27 mars. »
Au-delà du projet d’étude juridique sur la peine de mort soutenu par la Coalition mondiale, certaines organisations abolitionnistes souhaiteraient voir le Conseil des droits de l’Homme se saisir plus directement de la question de la peine capitale. D’autres estiment que le meilleur lieu de débat à ce sujet est l’Assemblée générale de l’Onu, qui a adopté deux résolutions appelant à un moratoire sur les exécutions.
Mise à jour du 31 mars 2009 :
Le Conseil des droits de l’Homme a adopté le 27 mars la résolution "torture" de sa 10e session après un vote, à la demande de l’Egypte. Le texte indique simplement que les membres du Conseil prennent note du rapport de Manfred Nowak.
Le paragraphe validant le rapport a été adopté par 27 voix pour, 10 contre et 10 abstention. La résolution a été adoptée par 34 voix contre 13.
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