Près de 1200 exécutions depuis l’élection du président iranien Rouhani
MENA
Le mardi 12 mars, Iran Human Rights (IHR) et Ensemble contre la peine de mort (ECPM) ont présenté le 7e rapport annuel sur la peine de mort en Iran de IHR.
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Malgré l’optimisme et l’espoir qu’avaient suscité l’élection de Hassan Rouhani à la présidence iranienne, il n’y a que peu de signes d’une amélioration des droits de l’Homme dans le pays. En réalité, une comparaison de la situation des 18 mois précédant et suivant l’élection présidentielle de juin 2013 montre que l’application de la peine de mort a augmenté.
Plus grave : le nombre de mineurs exécutés en 2014 est au plus haut depuis 1990.
A ceci s’ajoute le fait que les autorités iraniennes continuent d’exécuter des défenseurs pacifiques des droits civils et politiques.
L’exécution des professeurs Hadi Rashedi et Hashem Shabani, qui appartenaient à un groupe culturel arabe appelé « Al-Hiwar » (dialogue) ; de Gholamreza Khosravi, accusé d’avoir soutenu financièrement un groupe d’opposition interdit ; et de Mohsen Amir Aslani, inculpé pour avoir insulté le prophète Jonah et pour hérésie, ne sont que quelques exemples de cette pratique. La Cour suprême iranienne a maintenu la condamnation à mort de Soheil Arabi pour avoir insulté le prophète sur Facebook. Il reste sous la menace d’une exécution.
Le gouvernement responsable des exécutions publiques
D’après la Constitution iranienne, le gouvernement, dirigé par le président, n’a pas le pouvoir de prononcer et de mettre en œuvre des exécutions. C’est l’organe judiciaire qui en a la charge.
Cependant, les exécutions publiques semblent faire exception à la règle. Le gouvernement (représenté par le gouverneur local) détient l’autorité lui permettant de décider si une exécution peut être tenue en public ou non.
Par exemple, en 2014, le gouverneur des provinces de Sistan et Baluchistan (sud-est de l’Iran) avait initialement refusé l’exécution publique de trois terroristes présumés dans sa province. Cette décision a été modifiée (probablement du fait d’une pression politique) et les prisonniers ont été pendus en public.
Cela signifie que même si le pouvoir judiciaire prend initialement la décision de tenir l’exécution en public, le gouvernement, s’il le souhaite, peut en réalité empêcher une exécution publique. Ainsi, le gouvernement, dirigé par le président, est largement responsable du nombre très élevé d’exécutions publiques en Iran.
Influence présidentielle sur l’utilisation de la peine de mort
Malgré une légère baisse du nombre d’exécutions publiques, l’Iran compte parmi les rares pays pratiquant les exécutions publiques et figure en haut de cette liste avec l’Arabie Saoudite.
Par ailleurs, on observe une augmentation du nombre total d’exécutions sous la présidence d’Hassan Rouhani. De même, le pouvoir judiciaire, et non le gouvernement, possède le droit de prononcer et mettre en œuvre des exécutions. Ni le président, ni les représentants du gouvernement n’ont, ne serait-ce qu’une seule fois, critiqué le fort taux d’exécutions en Iran.
Il semble que le gouvernement Rouhani ne soit pas préoccupé par la question de la peine de mort. Cependant, cela peut changer si les pays impliqués dans un dialogue avec l’Iran l’ajoutaient à l’ordre du jour. Le gouvernement est normalement l’interlocuteur de la communauté internationale pour le dialogue avec l’Iran.
Réunions de haut niveau avec les émissaires internationaux
En 2014, de nombreuses rencontres ont eu lieu entre les autorités iraniennes et les gouvernements de différents pays occidentaux. A ceci s’ajoutent les à Téhéran visites de centaines d’élus occidentaux, de hauts représentants officiels de l’Union européenne ainsi que des ministres des Affaires étrangères de plusieurs pays dont la Norvège, la Suède, l’Italie, l’Espagne et l’Australie. Des dizaines de réunions de haut niveau impliquant les leaders Iraniens ont eu lieu sur la scène internationale.
Malgré un tel niveau d’engagement, les données collectées par Iran Human Rights (IHR) et publiées dans ce rapport montrent que le nombre d’exécutions en 2014 est le plus élevé depuis plus de 15 ans.
Ce rapport soulève la question de savoir si l’utilisation de la peine de mort est une problématique dans le dialogue bilatéral entre l’Iran et les pays qui sont les principaux porte-paroles de l’abolition de la peine de mort sur la scène internationale. Si la peine de mort est une question importante dans ces discussions, pourquoi le nombre d’exécutions augmente-t-il en parallèle à l’augmentation des relations diplomatiques ? Et, plus important, quelles mesures spécifiques la communauté internationale va-t-elle prendre pour renverser la tendance ?
La peine de mort doit être la première priorité des diplomates
Commentant le rapport, Mahmood Amiry-Moghaddam, le directeur et porte-parole d’IHR, indique que « malgré l’amélioration des relations entre la communauté internationale et l’Iran, la situation de la peine de mort s’est détériorée de manière significative sous la présidence d’Hassan Rouhani. Cette tendance ne peut continuer. Restreindre l’utilisation de la peine de mort doit être l’une des premières recommandations dans tout dialogue entre la communauté internationale et l’Iran. Il est temps de montrer que les droits de l’Homme peuvent également bénéficier de ces discussions ».
Le présent rapport a été publié quelques jours avant l’adoption du rapport de l’Examen périodique universel de l’Iran au Conseil des droits de l’homme, au cours duquel l’Iran devra répondre à plus de 290 recommandations, parmi lesquelles 39 sont spécifiques à la peine de mort. Au même moment, l’opposition publique à la peine de mort augmente en Iran. Un débat ouvert sur la question des exécutions publiques a lieu en ce moment.
De plus, quelques officiels iraniens ont indiqué le besoin de changer la loi contre les stupéfiants, afin de réduire le nombre d’exécutions pour des infractions liées à la drogue. Une modification supplémentaire de la législation concernant la peine de mort pour les délinquants mineurs a également été mentionnée. En parallèle, un mouvement en faveur du pardon se forme en Iran, où les familles des victimes assassinées dénoncent de plus en plus l’utilisation de la peine de mort en tant que sanction.
Raphaël Chenuil-Hazan, le directeur exécutif d’ECPM rappelle que « les relations diplomatiques et l’Examen périodique universel sont de bonnes opportunités pour améliorer la situation de la peine de mort en Iran. Mais cela demande une volonté plus forte de la part de la communauté internationale et des partenaires dialoguant avec l’Iran, en particulier l’Union européenne et ses membres ».
Étendre le mandat du rapporteur spécial
IHR et ECPM estiment qu’étendre la mission du Rapporteur spécial des Nations unies pour les droits de l’Homme en Iran, surveiller étroitement les recommandations de l’EPU acceptées par l’Iran, conditionner l’amélioration des relations avec l’Iran à la réduction de l’utilisation de la peine de mort et renforcer la société civile iranienne qui se bat contre la peine de mort sont autant de moyens qui permettrait à la communauté internationale de contribuer à la restriction de l’utilisation de la peine capitale en Iran.
IHR et ECPM ajoutent que l’abolition de la peine de mort pour les délinquants mineurs, les exécutions publiques et la peine de mort pour les infractions liées à la drogue sont des domaines pour lesquels des progrès significatifs peuvent être réalisés en 2015.
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Iran (République islamique d')