Conférence internationale contre la peine de mort : les abolitionnistes unis et déterminés

Publié par Lorène du Crest, le 18 juillet 2017

La Coalition mondiale fête ses 15 ans à Washington.

Cela fait 15 ans que de nombreux militants et professionnels agissent activement pour l’abolition de la peine de mort dans le monde. En 15 ans la Coalition a su faire ses preuves et se montrer efficace. En témoignent les nombreux évènements organisés chaque année lors de la Journée mondiale contre la peine de mort mais aussi les faits montrant qu’en 15 ans de nombreux pays ont aboli la peine de mort, avec l’exemple récent de la Mongolie, ce qui porte le nombre de pays abolitionnistes à 141.

Cette avancée est l’aboutissement et la preuve d’un travail sérieux et efficace des nombreux acteurs qui composent la Coalition. Le lieu choisi pour cette assemblée, Washington, est également plein de sens puisque les États-Unis restent, malgré une baisse sensible des exécutions ces dernières années, un État qui exécute des dizaines de personnes par an. L’organisation de cette conférence aux États-Unis a eu l’avantage de soutenir les organisations américaines et de sensibiliser un public américain sur la question en proposant notamment des séances ouvertes au public.

Plus qu’une assemblée générale, cette réunion s’est présentée comme une réelle conférence internationale contre la peine de mort par son programme et ses intervenants de qualité. Elle a réuni plus d’une centaine de participants et intervenants provenant de tous les continents et représentant 19 pays (États-Unis, Royaume-Uni, Malaisie, Maroc, Nigéria, Tunisie, Niger, Porto-Rico, France, Italie, Cameroun, Ouganda, Norvège, Tanzanie, Jordanie, Libéria, Taiwan, RDC et Australie) lui conférant ainsi une intéressante dynamique multiculturelle.

« Il est plus efficace de combattre la criminalité par un système judiciaire efficace plutôt qu’en ôtant la vie ».

Ce grand rassemblement des abolitionistes du monde a débuté par une cérémonie d’ouverture menée par la présidente de la Coalition mondiale, Elizabeth Zitrin. Plusieurs personnalités influentes sont également intervenues telles que l’ambassadeur de l’Union européenne aux États-Unis M.  David O’Sullivan, l’évêque Roy Campbell ainsi que le Parlementaire Hank Johnson, représentant le 4ème district de Géorgie. En se référant au cas des États-Unis, l’Ambassadeur de l’Union européenne a profité de cette cérémonie pour rappeler qu’il est « plus efficace de combattre la criminalité par un système judiciaire efficace plutôt qu’en ôtant la vie ».

Retrouvez le discours de l’ambassadeur M. O’Sullivan en intégralité dans
cet article.

Cette conférence internationale s’est ensuite poursuivie par une séance traitant de la peine de mort et la pauvreté, thème de la Journée mondiale 2017 , à laquelle sont intervenues Shreya Rastogi, Center on the Death Penalty, National Law University Delhi (Inde), Adaobi Egboka, LEDAP (Nigeria), Florence Belivier, FIDH, (France) ainsi que Robin Maher, avocate et professeur à l’Université George Washington. « Qu’est-ce que la pauvreté à avoir avec la peine de mort ? En un mot : tout » a affirmé Robin Maher.

Puis, deux ateliers ouverts au public se sont tenus dans l’après-midi. Le premier portait sur les mécanismes onusiens et l’Examen périodique universel, et a été animé par Amy Bergquist d’Advocates for Human Rights et Chiara Sangiorgio d’Amnesty International. Le second était destiné à présenter le manuel de formation pour l’abolition de la peine de mort en Afrique sub-saharienne animé par Angela Uwandu, Avocats sans frontières (Nigéria), Fulgence Massawe, Legal and Human Rights Center (Tanzanie) et Nestor Toko, Droits et Paix ( Cameroun).

 

Torture à Guantanamo et innocents condamnés à mort : les horreurs de notre temps.

La peine de mort aux États-Unis a fait l’objet d’une séance plénière avec l’intervention de Robin Maher ainsi que de Robert Dunham, directeur exécutif de DPIC et de Madhuri Grewal, the Constitution Project, qui ont tous deux mis en lumière le rôle des politiques locales en matière de peine de mort en soulignant que 5 procureurs sont responsables de 15 %  des condamnations à mort aux États-Unis et ont rappelé qu’aujourd’hui seuls 31 Etats ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique aux États-Unis.

Voir le rapport de The Constitution Project sur la peine de mort à Oklahoma.


Vous pouvez également lire
l’article de DPIC sur l’Assemblée générale de la Coalition mondiale.
 
Major Rashid Williams, avocat militaire à Guantanamo, a également pris la parole lors de cette séance en livrant un témoignage poignant de son expérience en tant qu’avocat d’un détenu dans cette prison. Il a ainsi précisé qu’actuellement 2 affaires mettent en cause 6 personnes condamnées à mort à Guantanamo et il a eu l’occasion de revenir plus particulièrement sur le cas de son client Ammar Al Balucci en affirmant que celui-ci a subi plusieurs actes de torture lors de son incarcération. C’est notamment ce que dénonce Amnesty International à travers sa campagne contre la torture et en militant pour la fermeture de Guantanamo.

Enfin, cette journée s’est terminée par d’émouvants récits de survivants des couloirs de la mort de Witness to Innocence, dont celui de Kwame Ajamu ayant passé plus de 28 ans dans les couloirs de la mort. En revenant avec justesse sur leur difficile parcours et sur les souffrances qu’ils ont dû supporter en tant qu’innocents, ces survivants ont donné à eux seuls tout son sens au combat contre la peine de mort qui doit continuer jusqu’à l’abolition de la peine capitale dans le monde.

La 2ème journée de cette conférence était consacrée à une réunion statutaire avec l’élection d’un nouveau comité de pilotage et d’un nouveau bureau exécutif, ainsi qu’à la tenue de différents ateliers dédiés aux organisations membres de la Coalition mondiale. Un atelier était présenté par Madalyn Wasilczuk, Sharon Pia Hickey, Cornell Center on the Death Penalty Worldwide (États-Unis), et Hsinyi Lin, Taiwan Alliance to End the Death Penalty (Taiwan), portant sur la méthodologie de la collecte de données dans les couloirs de la mort. L’autre atelier traitait de la communication et du plaidoyer, animé par Margot Freeman, experte en communication et Richard Dieter, ancien directeur du Death Penalty Information Center.

Cette conférence a été marquée par une implication active des membres à la fois en tant que participants et qu’intervenants, ainsi que par de riches et constructifs échanges qui aboutiront peut-être à des actions communes et des partenariats entre les membres.