Le soutien des abolitionnistes aux survivants des couloirs de la mort
Bonnes nouvelles
Une aide juridique pour les prisonniers des couloirs de la mort
Le 26 octobre 2017, Cheng Hsing-Tse fut acquitté par la Cour d’appel de Taiwan après 14 années passées dans le couloir de la mort. Cet heureux dénouement est le fruit du Taiwan Innocence Project, organisation membre de la Taiwan Alliance to End the Death Penalty. En effet, fondé en 2012, Taiwan Innocence Project assiste des prisonniers déjà condamnés à mort qui, malgré tout, continuent à clamer leur innocence. Comme Taiwan Innocence Project, de nombreuses organisations à travers le monde mettent à disposition leur compétence juridique au service des condamnés à mort. Au cours des 25 dernières années, Innocence Project a réussi à innocenter 351 prisonniers via des preuves ADN. Et le mouvement ne s’arrête pas aux « projets d’innocence ». En effet, d’autres organisations se mobilisent pour commuer les peines de mort. Le Malawi Capital Resentencing Project, par exemple, a conduit à la libération de 122 prisonniers au Malawi depuis 2007.
La vie après le couloir de la mort
Une fois libres, les survivants des couloirs de la mort ne sont pas laissés-pour-compte. Afin de les aider à reconstruire leur vie, de nombreuses organisations assistent les anciens détenus afin de faciliter leur réinsertion. Le Sunny Center, par exemple, fournit un refuge où les anciens condamnés peuvent bénéficier d’un environnement thérapeutique pour se reconstruire. A un autre niveau, Witness to Innocence a lancé une campagne afin que les anciens condamnés à mort puissent bénéficier d’une indemnisation fédérale. Cette question apparait d’autant plus centrale lorsque l’on sait la plupart des Etats des Etats-Unis refusent d’indemniser les survivants des couloirs de la mort malgré les dommages causés par leur incarcération. Paradoxalement, ces anciens condamnés à mort ne sont pas considérés comme d’ancien détenus, et de ce fait ne peuvent pas toucher les aides d’Etats prévues à cet effet. L’indemnisation est pourtant cruciale pour ceux ayant été libérés.
C’est pour cela que de nombreuses organisations telles que Witness to Innocence agissent pour remédier aux lacunes du système. En février 2006, 4 membres de l’association, tous innocentés, ont présenté au ministère de la Justice américain les besoins des anciens détenus des couloirs de la mort après leur libération. Le Malawi Capital Resentencing Project a également permis à d’anciens condamnés à mort de suivre une formation afin de devenir chauffeur. Grâce à de telles actions, les survivants du couloir de la mort peuvent réintégrer pleinement la société, et pour certains d’entre eux, devenir des militants luttant pour l’abolition de la peine de mort.
Des survivants des couloirs de la mort mobilisés.
Les survivants des couloirs de la mort se sont souvent mobilisés contre ce système pénal répressif dont ils ont été les victimes. Conscient que ces anciens détenus sont de formidables militants, Witness to Innocence a construit sa campagne de plaidoyer autour des récits de ces anciens condamnés à mort. L’organisation a même réalisé un documentaire, The Gathering, où 16 innocentés partagent leur histoire et leur opinion du système pénal américain. Ces anciens accusés à tort s’investissent à différents niveaux. Après trois ans dans le couloir de la mort, Kwame Ajamu est désormais le Président du Bureau de Witness to Innocence. Paris « Rocc » Powell a également rejoint l’équipe de l’organisation après avoir été condamné à mort en 1997 pour un crime qu’il n’avait pas commis.
Les familles : les autres victimes de la peine de mort
Les anciens condamnés à mort ne sont pas les seules victimes de la peine de mort. De nombreuses organisations telles que Journey of Hope and Murder Victims’ Families for Human Rights (MVFHR) ont d’ailleurs cherché à renverser cette présomption : les familles des victimes ne sont pas en faveur de la peine capitale, elles en sont aussi victimes. En effet, la peine de mort ne soulage pas leur chagrin. Au contraire, elle l’exacerbe. Malgré le fait que Vera Crutcher ait vu son propre fils se faire tuer par les membres d’un gang, cela ne l’a pas empêché de rejoindre Journey of Hope : « Même si ça fait mal, nous pardonnons. Nous pardonnons car c’est la seule façon de guérir. Si nous ne guérissons pas, cette colère nous dévorera comme un cancer ». Du 13 au 29 octobre 2017, les familles de victimes de meurtre ont effectué une tournée au Texas afin de partager leur histoire et militer pour la fin de la peine de mort au sein de l’Etat.
Les abolitionnistes n’oublient pas non plus les familles de ceux qui ont été exécutés. A ce sujet, MVFHR a lancé sa campagne « No Silence, No Shame » afin de mettre en lumière les difficultés rencontrées par les familles d’un condamné. A l’occasion de la 15ème Journée mondiale contre la peine de mort, VIASNA, en partenariat avec la Coalition mondiale, a publié une vidéo sur le combat de Tamara Sialun, mère d’un condamné à mort au Bélarus. Dans cette vidéo, elle décrit les difficultés rencontrées après la condamnation de son fils : « Je suis tombée dans un abysse de dettes duquel il est difficile de sortir (…) J’ai faim, mais je dois le supporter ».
Comme VIASNA ou Witness to Innocence, toutes ces organisations ont le même leitmotiv : apporter un soutien à tous ces survivants du couloir de la mort, et espérer que leur histoire incitera les pays rétentionnistes à abolir la peine de mort.