Villes pour la vie, Villes contre la peine de mort : la Communauté de Sant’Egidio plaide pour l’abolition universelle
Gouvernance
Présidée par Mario Marazitti, devant des images en direct d’un Colisée de Rome drapé de lumières et s’illuminant du slogan de cet événement « Pas de justice sans vie », la discussion a rassemblé de nombreux acteur·trice·s de l’abolition, responsables politiques, avocat·e·s, militant·e·s, et des personnes anciennement condamnées à mort.
David Sassoli, président du Parlement européen, a rappelé les efforts entrepris par l’Union européenne pour inciter les États qui ne l’auraient pas encore fait, d’abolir la peine de mort, soulignant le soutien répété de l’Union européenne envers la résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies en faveur d’un moratoire sur les exécutions. « Nous ne pouvons rester indifférents » à cette pratique, qui fait courir à des personnes innocentes un risque élevé d’être exécutées pour un crime qu’elles n’ont pas commis, et dont l’histoire n’a jamais su démontrer le prétendu effet dissuasif. Piétinant le droit à la vie, « la peine capitale représente un échec total de l’État de droit », a ajouté David Sassoli.
Les différentes présentations qui ont suivi ont chacune rappelé à quel point les systèmes juridiques sont faillibles, à plus forte raison lorsqu’ils condamnent à des peines irréversibles, comme la peine capitale. Toutefois, le chemin vers l’abolition universelle s’enrichit de progrès notables.
Les responsables religieux offrent parmi les voix les plus fortes contre la peine de mort, défendant l’idée que chacun jouit d’une dignité conférée par Dieu, indépendamment du mal qu’une personne a pu causer. Le Catholic Mobilizing Network, une organisation membre de la Coalition mondiale, mène également une campagne nationale aux États-Unis reposant sur trois principaux piliers, l’éducation, le plaidoyer et la prière, afin d’amplifier l’initiative contre la peine capitale lancée par la Conférence des évêques catholiques en 2005. Le nombre d’exécutions annuelles aux États-Unis a été divisé par plus de moitié depuis 2009, passant de 52 à 22 en 2019. Le président élu, Joe Biden, qui se revendique catholique, a promis de mettre fin aux exécutions fédérales qui ont repris en juillet dernier sous l’administration Trump après un moratoire de 17 ans. Quant au pape François, il avait lui-même surpris le monde entier lorsqu’il a exprimé son opposition à la peine de mort devant le Congrès américain en 2015 : « La société ne peut que bénéficier de la réhabilitation des personnes condamnées pour des crimes ».
Suzana Norlihan Alias, une avocate dont le frère est actuellement dans le couloir de la mort en Malaisie, a également expliqué que l’abolition procède des enseignements de l’Islam. Bien qu’en vertu de la législation du Qisas (qui signifie « représailles ») le meurtre soit passible de la peine de mort, elle donne également à la famille de la victime le droit de déterminer la peine qui devrait être infligée, puisque le crime a été commis à l’encontre d’une personne et non de l’État. Ainsi, les membres de la famille de la victime sont autorisé-e-s à pardonner à l’auteur-trice du crime et à lui accorder leur pardon, ce qui est encouragé par le Coran. En vertu de la Charia, a conclu Suzana Norlihan Alias, la peine capitale pour le meurtre ne constitue donc pas une peine obligatoire mais bien une exception.
La peine de mort elle-même s’avère progressivement être une exception qui n’est désormais appliquée que par une minorité d’États dans le monde. Alors qu’elle était la norme en matière de justice pénale dans les années 1970, lorsque seuls 16 pays l’avaient abolie, la peine capitale n’est plus appliquée que par 56 pays aujourd’hui. Cela est devenu possible grâce au dévouement et à la persévérance de nombreux acteurs et actrices, dont les villes qui se sont unies pour le droit à la vie, et les personnes qui se sont engagées à préserver la dignité humaine. Un hommage particulier a été rendu en ce sens à Bill Pelke, malheureusement décédé il y a quelques jours. Bill Pelke a consacré sa vie entière au combat contre la peine de mort, nous aidant à comprendre que sa pratique « ne fait que mettre la société au même niveau que ceux qui ont tué ».
L’évènement s’est achevé par un spectacle de lumières projetées sur le Colisée, appelant le monde à se rallier à l’abolition universelle : « Avec vous, l’avenir a déjà commencé ».
Vous pouvez trouver la retransmission de l’événement sur le site de la Communité de Sant’Egidio ici.
Crédits photos : Communité de Sant’Egidio