Plaidoyer abolitionniste à la 88ème Session CEDAW 

Plaidoyer

le 7 juin 2024

La 88e session du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) s’est tenue à Genève, en Suisse, du 13 au 31 mai 2024.

Au cours de cette session, le Comité a examiné le statut du Brésil, de l’Estonie, du Koweït, de la Malaisie, du Monténégro, de la République de Corée, du Rwanda et de Singapour. La Coalition mondiale contre la peine de mort (Coalition mondiale), ainsi que des représentantes du Réseau asiatique contre la peine de mort (ADPAN) et de HAYAT ont mené un plaidoyer visant à promouvoir l’abolition de la peine de mort et la fin des discriminations à l’égard des femmes et des personnes non conformes au genre passibles de la peine capitale au Koweït, en Malaisie et à Singapour où la peine de mort est encore appliquée en contradiction avec le principe des crimes les plus graves et avec les obligations CEDAW.

UNE DELEGATION ABOLTIONNISTE POUR RENDRE VISIBLE LES DISCRIMINATIONS DE GENRE A L OEUVRE DANS LA PEINE CAPITALE

Avant la 88e session du Comité, la Coalition mondiale a soumis des rapports sur les biais de genre dans la peine capitale au Koweït (avec The Advocates for Human Rights) et à Singapour (avec Transformative Justice Collective, APDPAN et Capital Punishment Justice Project). Pour la Malaisie, deux rapports distincts ont été soumis par ADPAN et par HAYAT, TAHR et Reprieve en réponse à la liste de questions du Comité CEDAW.

Pendant son séjour à Genève, la délégation de la Coalition mondiale a participé à des réunions publiques informelles du CEDAW, à des déjeuners d’information, et a eu l’occasion de rencontrer certaines expertes CEDAW lors de réunions privées. A ces occasions, les préoccupations majeures concernant la discrimination à l’encontre des femmes et des personnes non-conformes au genre condamnées à la peine de mort au Koweït, en Malaisie et à Singapour ont pu être soulevées. Les discussions ont notamment porté sur le manque d’hygiène et de soins médicaux et sexospécifiques dans les prisons, l’insuffisance de la représentation juridique et l’incapacité des systèmes judiciaires à prendre en compte les circonstances atténuantes dans la détermination de la peine, telles que la violence fondée sur le genre.

DIALOGUE CONSTRUCTIF DU CEDAW SUR LA MALAISIE

Grâce à l’engagement du mouvement abolitionniste lors de la 88e session, la question de la peine de mort a été abordée par les expertes et experts CEDAW au cours des dialogues constructifs. 

Lors de leur échange avec la délégation du gouvernement malaisien, des expertes CEDAW ont ainsi exprimé de nombreuses préoccupations concernant l’application de la peine de mort, y compris les défis associés au processus de révision des condamnations en cours (suite à l’abolition de la peine de mort obligatoire), tels que le manque de temps et de ressources pour la reconnaissance de mesures d’atténuation ou encore les enjeux relatifs à la reconnaissance des circonstances atténuantes liées. Des questions ont également été posées sur les conditions de détention des personnes dans le couloir de la mort, en particulier sur l’accès aux soins de santé pour les femmes dont les femmes trans. Au cours de ce dialogue constructif, les experts et expertes CEDAW ont souligné que la peine de mort était une question relevant de CEDAW et ont conclu en interrogeant les projets d’abolition de la peine de mort du gouvernement malaisien, réaffirmant ainsi leur engagement en faveur de l’abolition de la peine de mort.

En revanche, les réponses de la délégation malaisienne, bien que reconnaissant les problèmes soulevés, manquaient de profondeur et de spécificité notamment sur un programme clair en faveur de l’abolition. Bien que la délégation ait présenté quelques statistiques concernant les femmes condamnées à mort et souligné les droits légaux et les réformes récentes, elle n’a pas fourni de mesures concrètes pour mettre fin aux discriminations subies par les femmes et les personnes non conformes au genre condamnées à mort et n’a pas répondu aux préoccupations soulevées concernant la procédure de re-condamnation. En outre, la délégation n’a pas approfondi les raisons sous-jacentes du nombre élevé de ressortissantes étrangères dans le couloir de la mort, ni apporté de réponses sur les des conditions d’incarcération pour les femmes, y compris les femmes transgenres. Il est important de souligner que l’engagement du gouvernement à maintenir le moratoire est un développement bienvenu. Toutefois, la réponse de la délégation aux questions sur les plans d’action après l’abolition de la peine de mort obligatoire était prudente, car elle n’indiquait pas clairement la voie à suivre ni le calendrier pour l’abolition complète de la peine de mort.

La publication prochaine des observations finales du Comité CEDAW permettra aux ONG locales du Koweït, de Malaisie et de Singapour de poursuivre leur plaidoyer abolitionniste en exhortant leurs gouvernements respectifs à mettre en œuvre les mesures nécessaires et les recommandations formulées par le Comité pour mettre fin aux discriminations que rencontrent les femmes et les personnes non conformes au genre face à la peine de mort. 

PLAIDOYER ABOLISTIONNISTE EN MARGE DE LA SESSION

Tout au long de cette session, la délégation de la Coalition mondiale s’est entretenue avec d’autres parties prenantes stratégiques, notamment le personnel du Rapporteur Spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et le groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles. Ces réunions ont permis la transmission d’informations nécessaires à l’inclusion des questions de genre et de peine de mort dans les mandats de ces Procédures Spéciales. 

Le plaidoyer pour l’abolition de la peine de mort mené par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et les Procédures Spéciales des mécanismes droits humains des Nations Unies, est un pas de plus dans la bonne direction.

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