Une opportunité pour en finir avec l’injection létale aux États-Unis

Abolition

le 15 novembre 2007

“On ne saurait exiger des cautions excessives, ni imposer des amendes excessives, ni infliger des châtiments cruels et inhabituels” : le 8e amendement de la Constitution américaine a joué un rôle déterminant dans la mise en place du moratoire de fait imposé sur les exécutions dans le pays.

Le 30 octobre, la Cour suprême a suspendu l’exécution d’Earl W. Berry, juste avant qu’il ne reçoive une injection létale dans l’État du Mississippi.

Voici la preuve qu’elle bloquera toutes les exécution jusqu’à ce qu’elle ait examiné les questions soulevées par deux autres condamnés à mort, Ralph Baze et Thomas C. Bowling, sur la constitutionnalité de l’injection létale – la seule méthode actuellement obligatoire aux États-Unis.
Selon les avocats des deux condamnés du Kentucky, “les produits et les procédures utilisés par l’injection létale constituent une punition cruelle et inhabituelle en violation du 8ème amendement de la Constitution américaine.”

Bien qu’ils ne remettent pas en cause la légitimité de la peine capitale en soi, ils ont offert aux abolitionnistes américaines une nouvelle occasion de mettre la peine de mort en examen.

Vendla Meyer, membre d’Amnesty International et d’ECPM, explique: “Les auditions à la Cour suprême américaine en janvier vont exposer au public ce qui se passe exactement au cours d’une injection létale. Il devrait y avoir des médecins, des experts scientifiques, des responsables de prisons, des témoins de tout le pays. Les méthodes à la va-vite actuellement appliquées dans différents États, les protocoles secrets appliqués de façon inepte seront mis en lumière.”

Même si ce cas ne conduit pas la Cour suprême à interdire les injections létales, il présente l’opportunité d’exposer la terrible réalité de la peine de mort. C’est crucial aux États-Unis où, selon Vendla Meyer, le public soutient la peine de mort “parce qu’il la voit comme un problème abstrait.”

Jonathan Groner, chirurgien à l’hôpital Nationwide Children’s à Colombus, dans l’Ohio, et militant contre l’injection létale, espère également que “le public réalisera que pendant ce moratoire de fait, le taux de criminalité n’augmente pas.”

Les médecins devraient « rester en dehors » des salles d’exécution

 

 

En tant que médecin, il estime que sa profession aurait beaucoup à faire pour contribuer à mettre fin aux injections létales.
La présence d’un médecin est toujours requise pour accomplir une exécution, ne serait-ce que pour prononcer le décès. “Nul besoin de protester, si nous refusions simplement de participer, il n’y aurait pas d’exécution aux États-Unis", affirme Jonathan Groner.
Les médecins, qui font le serment de soigner et de ne pas tuer lorsqu’ils rejoignent la profession, se voient également invités par leurs organisations professionnelles à refuser de participer aux exécutions. Le Conseil International des Infirmières incite même ses membres à “faire pression pour l’abolition de la peine de mort.”
Pourtant, Jonathan Groner a remarqué que la plupart des médecins américains ne sont pas au courant de ces consignes : "Une large campagne est nécessaire pour les rendre publiques, et doit s’accompagner de la pression des pairs pour s’assurer qu’aucun médecin ni aucune infirmière ne prend part aux exécutions.
Il cite le cas d’un chirurgien du Missouri qui a participé à de nombreuses exécutions et dont le nom a été rendu public : "ils n’ont trouvé personne pour le remplacer.” En Californie, les organisations professionnelles ont publiquement appelé leurs membres à rester en dehors des chambres d’exécution.
Jonathan Groner critique également la participation de médecins dans l’élaboration de protocoles d’exécution soi-disant “humains” : "Si vous remontez l’histoire, les Nazis ont impliqué les médecins dans l’exécution de citoyens handicapés physiques et mentaux, la guillotine fut mise au point pour tuer les gens “humainement”… Mais ces méthodes ont été utilisés de façon inhumaines : elles étaient une excuse pour l’exécution de gens qui n’auraient pas du être exécutés."

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