Le Bénin en marche vers l’abolition

Abolition

le 7 février 2010

Quel sont les projets du Bénin concernant l’abolition de la peine de mort dans les mois à venir ?
Victor Tokpanou : Ce sujet a semblé important au président de la République dans le cadre de la promotion des droits de l’homme et de la dignité humaine. Un projet de loi a été envoyé à l’Assemblée nationale il y a trois mois à des fins de discussion et éventuellement d’adoption. Dans le cadre de cette révision constitutionnelle, en théorie, l’exécutif a fait ce qu’il avait à faire : l’étude préalable, la rédaction du texte et le dépôt sur le bureau de l’Assemblée nationale. Mais le gouvernement continue son lobbying auprès des parlementaires. Le texte sera examiné lors de la première session parlementaire de l’année en avril et nous espérons le voir adopté avant la fin du premier semestre.

La voie constitutionnelle permet d’enraciner solidement l’abolition dans le droit, mais comporte des difficultés liées à la modification de la loi fondamentale du pays. Pourquoi avoir choisi cette voie ?
Cette solution n’a que des avantages. Dans le cadre judiciaire qui est le nôtre, c’est la constitution qui est la norme supérieure. Une fois qu’une disposition est inscrite dans la constitution, c’est très difficile de revenir dessus. La révision constitutionnelle associe l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Elle montre l’engagement de tous. La loi n’est plus une référence à laquelle on ne peut plus toucher. Elle n’est plus une garantie de stabilité.

Des projets d’abolition de la peine de mort ont échoué par le passé au Bénin. Pourquoi pensez-vous que la période actuelle se prête à un nouvel examen de la question ?
Il y a deux aspects : l’évolution sociologique d’une part, et la volonté politique d’autre part. Nous sommes dans le même cas de figure que quand la France a aboli la peine de mort avec le président Mitterrand et le ministre Badinter. Il y a des résistances. Mais de fait, la peine de mort n’existe plus. Elle est dans l’arsenal juridique mais personne ne l’a utilisée depuis 20 ans. Certains croient qu’elle est toujours utile comme épée de Damoclès. Mais le président et le gouvernement leur ont opposé leur volonté politique.

Souhaitez-vous adhérer à la dynamique régionale qui voit la peine de mort reculer en Afrique sub-saharienne et influencer d’autres Etats africains en faveur de l’abolition ?
Ce n’était pas cela au départ. Nous voulions régler un problème interne. Notre période de non-utilisation de la peine de mort est plus ancienne que l’abolition dans certains pays voisins. Mais il est aussi vrai que c’était une demande persistante de certains de nos partenaires. La participation du président Yayi Boni à un récent colloque sur l’abolition de la peine de mort à Madrid participait de sa volonté de porter sa démarche haut et fort. Nous sommes très fiers de faire partie de cette dynamique. En faisant partie du groupe de pays ayant déjà aboli, nous pouvons être non pas un modèle, mais de conseil pour les autres, à partir de notre expérience.

Plus d'articles