Malawi – cinq ans après l’abolition de la peine de mort obligatoire

Publié par Emile Carreau, le 19 septembre 2012

Suite à cette décision, de nouveaux procès ont été accordés à plus de 180 prisonniers condamnés à mort pour réviser leur peine. Ces nouveaux procès donnent aux condamnés la possibilité de présenter des circonstances atténuantes au le tribunal afin que le juge puisse être amené à prononcer une autre peine que la peine de mort.
Fantastique, n’est-ce pas? Oui. Mais, combien de prisonniers ont, dans les faits, eu ce nouveau procès ? La réponse est malheureusement déprimante : zéro. Pas un seul des 180 condamnés n’a pu avoir une révision de son procès en cinq ans, depuis la décision Kafantayeni. Le système de justice pénale du Malawi n’est tout simplement pas en mesure de garantir que les droits de ces prisonniers soient respectés.

Avoir accès à un avocat

Comme aucun des prisonniers n’a les moyens d’engager un avocat privé, ils sont tributaires de l’aide juridique. Cependant, dans un pays de 14 millions d’habitants, où la grande majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, il n’y a que 18 avocats offrant une aide juridique et luttant pour répondre à la demande massive. En outre, la prison de sécurité maximale de Zomba est à 70 km des plus proches avocats offrant une aide juridique sans aucun moyen de transport.
Même si les avocats de l’aide juridique avaient le temps et les ressources pour aider ces prisonniers, ils seraient confrontés à de nombreux obstacles. Pour la majorité des prisonniers, leurs dossiers ont été perdus dans le dédale des fichiers qui jonchent les registres criminels à travers le pays. En leur absence, il est extrêmement difficile pour les avocats de développer des arguments convaincants en matière de circonstances atténuantes.
Ce qui rend la situation encore plus urgente, c’est le fait que l’espérance de vie moyenne en prison est de 10 ans. En raison de la nature de la surpopulation des prisons au Malawi, les prisonniers sont entassés dans des cellules comme des sardines (photo) ce qui facilite la propagation du VIH et de la tuberculose. Avec une espérance de vie si courte, il est possible que beaucoup de ces prisonniers meurent avant de pouvoir faire appel de leur condamnation.

Aider l’aide juridique

Plusieurs organisations travaillent actuellement pour aider à faire face aux besoins énormes d’aide juridique dans le pays. Le Center for International Human Rights a préparé plusieurs appels pour certains condamnés à la peine de mort obligatoire. Trois de ces condamnés qui étaient mineurs au moment des faits auront leur appel entendu en octobre cette année.
Le Centre for Capital Punishment Studies (CCPS) travaille à réduire le nombre de prisonniers en détention provisoire pour les homicides. Certains sont en attente de procès depuis plus de huit ans. Le CCPS a mis au point un «projet de libération sous caution» qui forme et envoie des étudiants en droit du Malawi dans les prisons pour écrire les demandes de mise en liberté qui sont ensuite transmises à l’aide juridique.
Malgré tout, l’abolition de la peine de mort obligatoire avec la décision Kafantayeni et le moratoire de fait  sur les exécutions au Malawi depuis 1992 mettent le pays en bonne position pour l’abolition de la peine de mort. Des pays qui, comme le Malawi, ont fait une transition démocratique, perçoivent souvent l’abolition de la peine de mort comme une étape nécessaire pour signaler leur attachement aux droits de l’homme. Ces dernières années, deux pays voisins du Malawi, l’Afrique du Sud et le Mozambique ont aboli la peine de mort.

Catégories

Malawi

Plus d'articles