La peine de mort au Japon sur la sellette
Asie
Militants des droits de l’Homme, avocats, religieux, universitaires, artistes, anciens condamnés à mort, diplomates, Japonais et étrangers… La liste des intervenants au débat public tenu au centre culturel italien de Tokyo le 29 octobre sur le thème "Pas de justice sans vie : la peine de mort dans un monde globalisé" est impressionnante (photo).
La Communauté de Sant’Egidio, une organisation membre de la Coalition mondiale, a organisé l’événement. Son porte-parole, Mario Marazziti, y a affirmé que "le Japon devrait suivre la tendance mondiale sur ce sujet".
Selon lui, la conférence a été "incroyablement intéressante et prometteuse, mettant en contact de nombreux groupes japonais parmi les forces sociales, culturelles, politiques et religieuses" dans le débat sur la peine de mort.
Fait méconnu dans le reste du monde, le Japon est l’une des rares démocraties à procéder encore à des exécutions. Informez-vous sur la situation de la peine de mort dans le pays avec ces faits rassemblés par Advocates for Human Rights, une autre organisation membre de la Coalition mondiale.
Quelles sont les dernières nouvelles concernant la peine de mort au Japon ?
Le 27 septembre 2012, le Japon a exécuté deux condamnés. Il s’agissait des sixième et septième exécutions dans le pays cette année. 131 prisonniers restent dans le couloir de la mort.
Le ministère de la Justice a récemment publié des documents détaillant le processus administratif de délivrance des arrêtés d’exécution. Ces informations décrivent un processus opaque dans lequel on ne sait pas pourquoi ni comment un condamné est désigné pour être exécuté.
Le 6 juin 2012, trois responsables du ministère de la Justice ont déclaré que la possibilité d’adopter des injections létale à l’américaine était à l’étude, bien que cette méthode d’exécution doit remise en cause dans plusieurs Etats américains car elle pourrait constituer un châtiment cruel et inhabituel.
Qui peut être condamné à mort au Japon et quelle est la procédure ?
18 crimes sont punis de pendaison. Le Japon n’a mené aucune des réformes recommandées dans le cadre de la Revue périodique universelle pour s’assurer que des garde-fous soient en place pour protéger les innocentes et les personnes irresponsables d’une éventuelle exécution.
De plus les conditions de traitement dans le couloir de la mort constituent un traitement cruel et inhumain.
Dans le système de prison alternative appelé Daiyo Kangoku, les suspects risquent de subir la torture et d’autres traitements dégradants. La police peut y interroger des suspects pour 23 jours sans que des poursuites soient engagées contre eux.
Les procureurs et les autorités disposent d’un large pouvoir pour déterminer quand l’avocat de la défense peut avoir accès à l’accusé au moment des interrogatoires, et quels extraits de ces interrogatoires peuvent être utilisés dans la procédure.
Un individu peut être exécuté sans que sa condamnation ait été confirmée en appel.
Comment sont traités les condamnés à mort au Japon ?
La loi japonaise impose que les condamnés à mort soient détenus dans des cellules individuelles et leur interdit tout contact entre eux. La mise à l’isolement n’est pas l’exception, mais la règle.
Les normes de détention « Tranquillité d’esprit » sont un prétexte pour imposer des traitements durs, y compris des restrictions de communication avec l’extérieur et le refus d’expertises et de traitements psychiatriques indépendants.
Les autorités n’informent les condamnés de leur exécution que le jour-même, tandis que leur famille et leur avocat ne sont prévenus qu’après l’exécution.
Que devrait faire la Japon au sujet de la peine de mort ?
Le pays devrait réformer son système pénal pour respecter les normes internationales, notamment :
– introduire la transparence dans toutes les étapes de la procédure pénale ;
– surveiller les interrogatoires à toutes les étapes de l’instruction ;
– mettre en place un système d’appel systématique après toute condamnation à mort ;
– interdire aux procureurs de requérir la peine de mort en appel après une condamnation plus légère en première instance ;
– suspendre les arrêtés d’exécutions pendant toutes les procédures consécutives à un condamnation, notamment les demandes de nouveaux procès et de grâce.
La mise à l’isolement indéfinie des condamnés à mort doit cesser et les conditions de détention s’aligner sur les normes internationales, y compris la garantie d’accès à un avocat et de communication avec l’extérieur.
Les autorités devraient informer à l’avance les condamnés, leurs avocats et leurs familles de la date d’exécution.
Le Japon devrait également mettre ne place un système indépendant et spécialisé pour l’évaluation psychologique et psychiatrique de chaque condamné à mort à différentes étapes de la procédure pour éviter l’exécution de personnes souffrant de maladie mentale ou de capacités intellectuelles insuffisantes.
Advocates for Human Rights et la Coalition mondiale appellent le gouvernement japonais à mettre en place un moratoire sur les exécutions et à créer un groupe d’experts transparent et officiel pour évaluer l’application de la peine de mort au Japon et diffuser l’information sur la peine capitale et le système pénal auprès du public.