Conditions « catastrophiques » dans le couloir de la mort libanais
MENA
Depuis le 19 janvier 2004, aucune exécution n’a eu lieu au pays du Cèdre. Mais la peine de mort est toujours inscrite dans la loi libanaise et près de 60 condamnés à la peine capitale attendent de connaître leur date d’exécution.
La majorité d’entre eux sont incarcérés à la prison centrale de Roumieh. Les conditions de détention y sont « catastrophiques », comme ne cesse de le déplorer Ogarit Younan, qui agit depuis 30 ans pour diffuser la culture de la non-violence et des droits de l’homme.
Ogarit Younan est fondatrice et présidente de l’Université académique pour la non-violence et les droits de l’Homme (AUNOHR).
La LACR, qu’elle a créée en 2003 avec le penseur non-violent Walid Slaybi et Me Hani Feghali, organise des visites régulières aux prisonniers et est ainsi capable de fournir annuellement des statistiques à Amnesty International et à d’autres organismes internationaux sur cette population carcérale « majoritairement pauvre, démunie de toute aide juridique et dont les droits humains sont constamment violés ».
Depuis le lancement de la Campagne nationale pour l’abolition de la peine de mort en 1997, la LACR poursuit deux objectifs en parallèle :
– faire voter au Parlement un projet de loi abolissant la peine capitale ;
– instituer une culture de l’abolition, à travers la sensibilisation et l’éducation de la société. Il s’agit de travailler sur les mentalités et de préparer les nouvelles générations à des alternatives non violentes. Pour y parvenir, l’un des points essentiels du travail de la LACR prend la forme d’un programme pionnier dans les écoles, de sessions de formation régulières pour les activistes et de matériels éducatifs innovants dont un manuel.
« Une lutte dans la rue »
Ogarit Younan se souvient avec nostalgie de la ferveur des manifestations abolitionnistes à la fin du 20e siècle. « Une lutte dans la rue qu’il faudra reprendre le moment propice », déclare cette militante qui ne perd jamais espoir.
Selon elle, les élections législatives prévues en juin ne constituent pas un moment opportun, bien au contraire. En effet, les députés ne mentionnent pas dans leur programme l’abolition de la peine de mort, qui n’est pas une priorité dans un pays toujours meurtri par la guerre. « Le moment propice, nous allons le créer après les élections », poursuit-elle.
Elle rappelle les résultats satisfaisants des sondages d’opinion réalisés auprès des députés en 2001 (74 % pour l’abolition), puis 2009 (68 %), qui prouvent que c’est par un travail progressif et régulier que le Liban s’approche de l’abolition.
Solidarité internationale
Pour Ogarit Younan, être membre de la Coalition mondiale contre la peine de mort, c’est faire un pas de plus vers l’abolition. Elle souligne l’importance de la solidarité internationale : « Etre solidaire les uns avec les autres est un besoin mondial, humain et politique. »
En tant qu’écrivains et chercheurs, Ogarit Younan et Walid Slaybi peuvent transmettre leurs connaissances sur la peine de mort : « Une coalition mondiale est un lieu qui ne peut être positif et utile que si les membres décident d’apprendre de l’autre et d’apporter à l’autre. »
Autre apport positif : aider la LACR à convaincre sur place les décideurs politiques et religieux, à faire accepter la résolution de l’ONU sur le moratoire universel et à faire pression sur le Parlement pour voter un projet de loi.
La LACR a désormais besoin d’activités plus massives et médiatisées pour un impact plus grand. C’est dans ce sens qu’elle travaille depuis le début de l’année 2013 en partenariat avec ECPM, également membre de la Coalition mondiale, sur un projet pour consolider la Campagne libanaise contre la peine de mort. Financé par l’Union européenne jusqu’à mi-2014, ce projet comporte quatre volets principaux :
– l’éducation à l’abolition dans les écoles ;
– l’élargissement et la restructuration de la coalition nationale ;
– le lobby politique ;
– les publications ;
– la contribution au niveau international à la Coalition mondiale et au 5e Congrès mondial.
Photo: Ogarit Younan anime un atelier sur l’abolition de la peine de mort (source: deathpenaltylebanon.org)