L’Assemblée générale de l’ONU a voté à une écrasante majorité pour une 6e résolution appelant à un moratoire universel sur les exécutions

Publié par Elise Guillot et Aurélie Plaçais, le 20 décembre 2016

Confirmant le vote de la Troisième Commission de l’Assemblée générale des Nations Unies (AGNU), la résolution A/RES/71/187 a été adoptée à une large majorité, avec de nouveaux Etats votant en sa faveur. 117 Etats ont en effet voté pour la résolution et 40 contre (+2 comparé à 2014), tandis que 31 se sont abstenus (-3) et que 5 étaient absents. 89 Etats ont co-sponsorisé la résolution.

L’adoption de cette résolution confirme et soutient la tendance mondiale vers l’abolition de la peine de mort.

Le reflet de la situation actuelle de la peine de mort dans le monde

Faisant suite à la récente abolition de la peine de mort dans leurs législations, la Guinée et Nauru ont voté en faveur de la résolution et la Guinée l’a co-sponsorisée pour la première fois. La Mongolie était l’un des deux co-sponsors principaux et les îles Fidji ainsi que le Suriname ont confirmé leurs votes positifs pour la deuxième fois consécutive.

Les évolutions récentes dans les pays abolitionnistes en pratique ont aussi mené à des changements de vote en faveur de la résolution : le Malawi et le Swaziland ont voté pour, une première. Le Zimbabwe est passé d’un vote négatif à une abstention et le Sri Lanka de l’abstention à un vote favorable à la résolution, confirmant les engagements pris lors du 6e Congrès Mondial contre la Peine de Mort en juin 2016. La République Démocratique du Congo, qui avait pris des engagements similaires lors du Congrès Mondial, était malheureusement absente lors du vote.

Les débats nationaux et crises politiques se sont par ailleurs reflétés dans certaines des évolutions de vote défavorables à la résolution. Le Burundi et le Soudan du Sud ont voté contre la résolution alors qu’ils avaient voté en sa faveur les années précédentes tandis que les Philippines, le Niger, la Guinée Equatoriale et les Seychelles sont passés d’un vote positif à l’abstention. Les Maldives ont malheureusement rejoint l’opposition, alors qu’elles s’étaient abstenues en 2012 et 2014.

Un noyau dur de pays rétentionistes réduit mais très actif

Alors que le nombre d’Etats opposés à la résolution est passé de 54 en 2007 à 37 en 2014 et 40 en 2016 et que le nombre d’Etats signataires de la déclaration de dissociation est passé de 58 en 2008 à 27 en 2015, un petit groupe de pays, menés par Singapour, a été très actif en 2016. Pour la première fois, ils ont réussi à faire passer un amendement au texte portant sur la souveraineté des Etats. Présenté par Singapour, l’amendement a été adopté sur le fil par 76 Etats lors de la Troisième Commission, tandis que 72 ont voté contre. Il est néanmoins très intéressant de noter que l’amendement n’a pas eu la moindre répercussion sur l’issue du vote.

La résolution assimile explicitement la peine de mort à une question relative aux droits humains, appelant les Etats à « instituer un moratoire sur les exécutions en vue d’abolir la peine de mort ». Ainsi que Singapour l’a souligné lors des débats, « L’objectif […] s’est déplacé au cours des ans, passant d’un moratoire à une pression pour l’abolition de cette pratique ». Le texte appelle par ailleurs les Etats à ratifier le Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort.

La résolution de 2016 a également introduit de nouveaux éléments pour renforcer le texte et encourager tous les États à prendre des mesures en vue de respecter le droit international et de restreindre le recours à la peine de mort. Le paragraphe 6(f) appelle ainsi les Etats à « faire en sorte que les personnes passibles de la peine de mort puissent exercer leur droit de recours en grâce ou en commutation de peine en s’assurant que les procédures de grâce sont justes et transparentes ». Afin d’accroître la transparence, l’AGNU a aussi appelé les Etats à présenter les informations relatives à l’application de la peine de mort en précisant le sexe, âge et race des personnes condamnées (Paragraphe 6(c)).

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