L’Université de droit de Cornell à Ithaca lance l’Institut Makwanyane
Afrique
Cet Institut, nommé après la célèbre affaire de 1995 qui a permis l’abolition de la peine de mort en Afrique du Sud, a été créé à l’initiative du Cornell Center on the Death Penalty Worldwide. Fondé l’année dernière, il est devenu le premier centre de ce genre aux Etats Unis.
Les avocats participants ont été formés par 18 experts juristes qui ont animé des ateliers sur différentes problématiques telles que : les enquêtes et les circonstances atténuantes, les condamnations injustifiées, ou encore les techniques pour s’entretenir avec ses clients. Les participants ont également eu l’occasion de discuter de leurs affaires en cours et d’échanger sur les stratégies qui pourraient mener leur pays à l’abolition de la peine de mort.
« C’est un super projet pour une Université de droit, d’amener toutes ces personnes ici et que Cornell soit l’hôte de cette institution », se réjouit Sandra Babcock, Professeure de droit fondatrice du centre et directrice de la faculté. « Notre but et de fournir aux avocats africains les outils dont ils ont besoin pour sauver la vie de leurs clients et afin d’aboutir à un changement radical du système pénal ».
Babcock a créé le centre après avoir passé presque 10 ans à travailler sur un projet au Malawi. Ce projet consistait à fournir une représentation juridique aux condamnés à mort. En 2007, le Malawi a aboli la peine de mort obligatoire pour homicide, permettant ainsi aux détenus qui ont été condamnés à mort d’être rejugés.
A la suite de ce projet, la Haute Cour du Malawi a rejugé 150 condamnés à mort et libéré 120 d’entre eux, précise Babcock, qui a travaillé avec de nombreux étudiants sur ces cas. Aucun d’entre eux n’a été de nouveau condamné à mort et seulement un d’entre eux a reçu la prison à vie.
Au cours de ses vingt voyages au Malawi, Babcock dit avoir été surprise par le nombre de barrières empêchant une représentation efficace des condamnés à mort : les avocats connaissent mal le concept des circonstances atténuantes, ils n’ont reçu qu’une courte formation leur conférant des compétences de base en matière d’audience, ils ne se rendent pas compte de l’importance de la santé mentale de leur client dans ces affaires et la décision des Cours ne leur est pas accessible car pas publiée.
« L’Institut est né suite à mes observations sur la situation du Malawi, lorsque j’ai réalisé que les avocats d’autres pays africains faisaient face au même genre de situations » affirme-t-elle.
L’année dernière, le centre a reçu un prêt de 3.25 millions de l’Atlantic Philanthropies fondé par un ancien élève de Cornell, Charles F. Feeney, 56 ans, ce qui a aidé l’Institut.
Noel Brown, juriste au Nigéria, précise qu’il est venu à l’Institut pour apprendre à mieux défendre ses clients et pour apprendre à rechercher des jurisprudences. Ce qui est compliqué dans son travail en tant qu’avocat de la défense pour des cas de peine capitale est que le Nigéria et l’un des deux pays d’Afrique à encore disposer de la peine de mort obligatoire pour des crimes tels que l’homicide, le vol à main armé ou encore le kidnapping avec mort de la victime.
« C’est un art », dit Brown. « Tu dois savoir comment appréhender les complexités d’une bataille légale au tribunal. Normalement, la loi dit qu’un accusé est innocent jusqu’à qu’il soit prouvé qu’il soit coupable, mais dans la pratique il est plutôt coupable jusqu’à ce qu’il prouve qu’il soit innocent »
Dziko Malunda, procureur au Malawi, a participé à l’Institut en tant que formateur en se basant sur son expérience d’ancien avocat de la défense. Malunda a aussi travaillé avec Babcock sur le projet de réexamen des affaires après que le Malawi ait aboli la peine de mort obligatoire.
« L’institut fera la différence » dit Malunda. « J’espère que sur le long terme, cela permettra de renforcer les capacités d’un groupe entier d’avocats qui pourront alors retourner en Afrique et se battre ensemble pour l’abolition de la peine de mort ».
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Représentation juridique