La peine de mort relève de la torture, selon les experts
Normes internationales
Il est ressorti des présentations et des échanges que la peine de mort et la torture sont intiment liées. Au-delà du tragique de la situation auquel sont confrontés les condamnés à la peine capitale dans les couloirs de la mort, il a surtout été démontré que la pratique de la peine de mort peut être assimilée à de la torture ou des traitements cruels inhumains ou dégradants, que ce soit les méthodes d’exécutions, les conditions de détention des condamnés à mort ou le syndrome du couloir de la mort qui s’apparente à une torture psychologique pour les condamnés comme pour leur famille ou leurs proches.
Le Pr Manfred Nowak a été le premier rapporteur spécial des Nations Unies à travailler sur le lien entre l’interdit absolu de la torture et l’abolition de la peine de mort. L’opposition des États a été très forte à cette époque. Son successeur Juan Mendes a continué ce travail de recherche avec beaucoup de succès et est arrivé à la conclusion qu’une coutume de droit international était en train de se mettre en place considérant que l’application de la peine de mort constitue, en toute circonstance, un acte de torture.
La peine de mort relève de la torture
Ce lien entre la torture et la peine de mort est particulièrement visible quand on observe les conditions de détention des condamnés à mort : manque d’accès à la nourriture ou aux soins, isolement carcéral, quasi-absence de visite et de soutien de la part des familles et des proches. Ce lien devient encore plus flagrant lorsque l’on regarde la situation des femmes condamnées. C’est pour cela que la Coalition mondiale contre la peine de mort a décidé de consacrer la Journée mondiale contre la peine de mort du 10 octobre 2018 aux conditions de détention des condamnés à mort.
L’ONG SUARAM dans son intervention l’a très bien résumé à travers le récit d’un condamné : « j’ai été visité seulement 4 fois par un juge depuis 18 ans que je suis en prison dans l’attente d’être exécuté ! »
Au Tchad, l’ACAT Tchad a rappelé qu’avec l’adoption d’une loi spéciale anti-terroriste (dont il n’y a pas de réelle définition puisque des personnes sont condamnées à mort pour des crimes de droit commun) les personnes condamnées sont détenues dans les locaux de la DST sans accès à leur famille ou à leurs avocats et il est impossible pour la société civile de documenter leurs conditions de détention. De même, les présumés terroristes sont détenus dans une prison se trouvant à plus de 1000 km du tribunal dont ils relèvent ce qui rend impossible de mener une instruction crédible et un procès équitable.
Limiter l’exportation de produits déstinés à torturer ou exécuter
Il a également été rappelé que les méthodes d’exécution peuvent constituer des actes de torture. Pour cette raison, l’Union européenne a révisé en 2015 sa Directive sur l’interdiction de l’exportation des biens pouvant contribuer à des actes de torture en y incluant les produits utilisés pour les injections léthales.
La Commissaire Malmstrom a initié, à ce titre, la Global alliance for torture free Trade en 2017 en marge de l’AGNU afin d’inciter les États à s’engager à contrôler et limiter l’exportation de biens et produits pouvant servir à des actes de torture ou à appliquer la peine de mort. Cette alliance regroupe aujourd’hui 65 États membres des Nations Unies et pourrait, à terme, permettre l’adoption d’une convention juridiquement contraignante sur le sujet qui ne mettrait pas fin à la torture et à la peine de mort mais compliquerait la tâche pour les tortionnaires.
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Conditions dans le couloir de la mort