Les exécutions fédérales ont repris aux États-Unis
Cela faisait 17 ans que les États-Unis observaient un moratoire de fait sur les exécutions fédérales, prévues uniquement pour certaines infractions pénales. Ce moratoire a toutefois pris fin ce mois de juillet. Le 25 juillet 2019, William Barr, le Procureur général, avait ordonné la programmation de nouvelles exécutions fédérales, les premières depuis 2003. Un peu moins d’un an plus tard, le 14 juillet 2020, l’administration Trump a ainsi mis à mort Daniel Lewis Lee par injection léthale après de nombreux rebondissements judiciaires. Ce sont en fait trois exécutions fédérales qui auront eu lieu, la même semaine.
Le 14 juillet dernier, au petit matin, la Cour suprême des États-Unis a finalement levé, par à peine 5 voix contre 4, la décision d’une juridiction fédérale de suspendre l’exécution de Daniel Lewis Lee en raison de la souffrance induite par l’utilisation du produit destiné à le tuer. Interrogé par The Associated Press, William Barr avait assuré qu’il était du devoir de son ministère de mener toutes les condamnations à leur terme, au nom des victimes. La Coalition mondiale contre la peine de mort et la communauté abolitionniste s’oppose fermement à cet argument, selon lequel la mise à mort d’une personne apporterait un quelconque soulagement ou un quelconque sens de la justice. Parmi les parties qui avait aussi sollicité la suspension de l’exécution de Daniel Lewis Lee auprès des juridictions fédérales, se trouvaient aussi des familles de victimes, qui avaient plaidé pour une condamnation à la prison à vie. La peine de mort est un châtiment cruel qui n’engendre que la souffrance. Le témoignage de l’avocate de Daniel Lewis Lee, Ruth Friedman, est sans appel : « pendant les 4 heures qu’il a fallu à ce dangereux et impitoyable gouvernement pour poursuivre ses buts, Daniel Lewis Lee est resté attaché à un brancard : 31 minutes à peine après qu’une Cour d’appel ait levé le dernier obstacle à son exécution sur instigation du Gouvernement, et alors que de nombreux recours étaient en suspens, et sans notifier ses avocat·e·s, il a été exécuté ».
Deux jours plus tard, Wesley Purkey était exécuté à son tour après qu’une juridiction d’appel ait refusé d’entendre son recours, mentionnant dans son ordonnance que ses avocat·e·s se livraient « à des jeux de procédure » en interjetant appel auprès de plusieurs tribunaux. Le lendemain, l’administration menait à son insoutenable terme une troisième exécution fédérale contre Dustin Lee Honken. Une quatrième exécution est prévue à la fin du mois d’août.
La fin du moratoire fédéral constitue une épreuve terrible pour l’abolition aux États-Unis qui demeurent le seul État à procéder à des exécutions dans la région. La reprise des exécutions fédérales vont complètement dans le sens inverse des signes positifs que le pays avait envoyés en 2019 avec l’abolition de la peine de mort dans le New Hampshire et la mise en place d’un moratoire par le Gouverneur de Californie, dans l’État qui compte la plus grande population détenue dans les couloirs de la mort. Cette tendance positive en faveur de l’abolition s’était également poursuivie en 2020 après que le Colorado ait aboli la peine de mort en mars, devenant ainsi le 22ème État à abandonner la peine capitale.
La manière les exécutions fédérales ont repris aux États-Unis fait bien sûr écho à la Journée mondiale contre la peine de mort 2020, que la Coalition mondiale a consacré au droit à une représentation juridique effective. Bénéficier d’une représentation juridique à tous les stades de la procédure, jusqu’aux derniers recours devant la Cour suprême par exemple, constitue un droit fondamental. Wesley Purkey, 68 ans, qui a été exécuté le 16 juillet dernier, souffrait de la maladie d’Alzheimer et, selon ses avocat·e·s, ne comprenait pas pourquoi il avait été condamné à mort. La technicité des multiples recours judiciaires qui ont mis en suspens les ultimes moments de Daniel Lewis Lee, quant à elle, ne rend ce droit que plus vital.