Un premier semestre 2022 riche en abolitions

Bonnes nouvelles

Publié par la Coalition mondiale contre la peine de mort, le 13 septembre 2022

Les six premiers mois de 2022 ont été riches pour la communauté abolitionniste avec deux nouveaux pays abolitionnistes et une nouvelle ratification du Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant l’abolition de la peine de mort. Pourtant, quelques pays continuent d’avoir recours à la peine de mort et des augmentations importantes des exécutions sont à relever. 

Une année 2022 lancée sur les chapeaux de roues

Le premier mois de l’année 2022 a donné le la pour la communauté abolitionniste, avec l’annonce de l’abolition de la peine de mort en Papouasie Nouvelle Guinée le 20 janvier 2022. La République Centrafricaine a suivi quelques mois plus tard, en promulguant le 27 juin dernier une loi abolissant la peine de mort dans la législation. Elle est officiellement devenue le 24e État africain à abolir la peine de mort. 

D’autres États semblent enclins à abolir la peine de mort dans les mois qui suivent. Le Président de la République de Zambie a affirmé le 24 mai dernier son engagement en faveur de l’abolition de la peine de mort en commuant 30 condamnations à mort et en soumettant un projet de loi d’abolition de la peine de mort au Parlement. Il affirmait alors : 

Nous croyons qu’il faut montrer sa force à travers sa compassion et nous croyons aux droits de tous les citoyens, y compris le droit à la vie.  

En Malaisie, le cabinet du gouvernement a annoncé le 10 juin 2022 un accord sur l’abolition de la peine de mort obligatoire dans le droit national et la soumission au Parlement d’un projet de loi permettant l’application de peines alternatives lorsque l’infraction est passible de la peine de mort obligatoire. Une déclaration similaire avait été faite par le premier ministre précédant, Mahathir Mohamad, mais le projet de loi n’a finalement pas pu être examiné par le Parlement à cause de l’effondrement de la coalition au sein du gouvernement en février 2020. 

Enfin, après avoir promulgué une loi d’abolition de la peine de mort au début de 2022, le Kazakhstan a ratifié le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant l’abolition de la peine de mort qu’il s’était déjà engagé à ratifier trois ans plus tôt. 

Si ces nombreuses annonces promettent une année 2022 fructueuse pour la communauté abolitionniste, quelques points inquiétants restent à relever. 

Des évolutions inquiétantes dans les pays qui appliquent le plus la peine de mort

La peine de mort continue d’être largement appliquée aux États-Unis et plusieurs points d’ombre sont à relever. Si certains États comme l’Ohio et le Tennessee ont stoppé temporairement les exécutions, l’État d’Oklahoma a repris les exécutions après un hiatus de 6 ans initié à la suite de plusieurs exécutions bâclées. 8 exécutions ont été recensées à ce jour aux États-Unis, et plusieurs des personnes exécutées étaient atteintes d’handicaps intellectuels ou psychosociaux et 9 exécutions sont encore programmées pour le second semestre de 2022 : 4 en Oklahoma, 4 au Texas et 1 en Alabama. 

En Iran, le nombre d’exécutions recensées a grimpé de manière alarmante. Si 117 exécutions avaient été recensées durant le premier semestre de 2021, c’est cette année plus du double qui a été recensé sur la même période, avec 251 personnes exécutées. 137 exécutions ont eu lieu après le début des manifestations nationales le 7 mai 2022. Mahmoud Amiry-Moghaddam, directeur de l’ONG Iran Human Rights a déclaré : 

Il ne fait aucun doute que les exécutions généralisées sont utilisées par les autorités pour instiguer la peur dans la société afin d’empêcher de nouvelles manifestations antigouvernementales. En augmentant le coût politique des exécutions par le biais de campagnes populaires et d’une pression internationale accrue, on peut mettre un terme à cette vague d’exécutions. 

Voir la déclaration partagée par la Coalition mondiale contre la peine de mort à propos de l’augmentation des exécutions en Iran. 

Les exécutions ont également augmenté de manière inquiétante en Arabie Saoudite. En 6 mois, le pays a déjà presque doublé le nombre d’exécution recensées sur l’ensemble de l’année 2021, avec 110 exécutions au 6 juillet 2022 contre 67 en 2021. Le 12 mars ce n’est pas moins de 81 personnes qui ont été exécutées, souvent sur la base d’aveux obtenus sous la torture et à la suite de procès ne respectant pas les normes fixées par le droit international. 41 d’entre eux appartenaient à la minorité musulmane chiite. Cette exécution de masse, la plus importante depuis des années, a été condamnée par la Haute-Commissaire pour les droits de l’homme des Nations unies qui a affirmé que ces exécutions constituaient des violations des droits humains et du droit humanitaire et qu’il pourrait même s’agir d’un crime de guerre. Parmi les 110 exécutions recensées on compte plusieurs mineurs.  Le pays continue en effet de condamner à mort et d’exécuter des personnes qui étaient mineures au moment des faits, en violation du droit international.

À Singapour, le gouvernement a ordonné après plus de 2 ans d’interruption l’exécution le 30 mars dernier d’Abdul Kahar bin Othman après que celui-ci ait été condamné à la peine de mort obligatoire pour des infractions liées à la législation sur les stupéfiants. C’est au total 10 personnes qui ont été exécutées à Singapour en quatre mois. Parmi eux, Nagaenthran Dharmalingam, exécuté le 27 avril dernier alors qu’il avait été diagnostiqué comme présentant des troubles intellectuels et cognitifs. Cette pratique est prohibée par le droit international, au même titre que la peine de mort obligatoire, et que les condamnations à mort pour les crimes de droit commun, trois pratiques pourtant en vigueur à Singapour. 

La seconde moitié de 2022 s’annonce toute aussi riche. La République de Zambie pourrait devenir le 3e pays à avoir aboli la peine de mort en 2022, et la Malaisie pourrait faire un pas de plus vers l’abolition en abolissant la peine de mort obligatoire dans le pays. La situation à Singapour doit cependant être surveillée de près, de même que pour les autres pays qui exécutent le plus. 

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