Le regard caribéen sur la peine de mort objet d’une rencontre internationale

Caraïbes

Publié par Emile Carreau, le 26 octobre 2011

Les exécutions sont rares dans la caraïbe et la plupart des 25 pays de la région sont abolitionnistes en droit ou en fait. Pourtant, les défenseurs des droits de l’Homme et les universitaires présents à la conférence ont insisté sur les efforts nécessaires en faveur de l’abolition.
Kevin Miguel Rivera du barreau des avocats de Port Rico a souligné que « les gouvernements essayent de faire passer des lois pour permettre des exécutions » et que « les pays de la Caraïbe se sont mobilisés pour affaiblir la résolution sur le moratoire » à l’Assemblée générale des Nations unies en décembre 2010.
Saul Lehrfreund, qui représentait l’organisation britannique Death Penalty Project, a déclaré : « Il existe un désir dans un certaine nombre de pays de la Caraïbe de procéder à des exéutions » et « la majorité des pays anglophones de la région sont des bourreaux contraints ».
Il faisait référence à de récentes tentatives de plusieurs gouvernements de contourner les restrictions de droit international qui ont bloqué plusieurs exécutions.

Montée de la criminalité et opinion publique

Ces dernières années, le nombre de meurtres dans les îles de la région a augmenté de façon alarmante. Ce phénomène rend plus difficile un dialogue constructif sur l’abolition.
Carmelo Campos Cruz de la Coalition portoricaine contre la peine de mort a réfuté le prétendu rôle dissuasif de la peine capitale, un argument souvent avancé par les rétentionnistes. « Il n’y a aucune corrélation entre la peine de mort et le taux de crimes violents », a-t-il affirmé.
L’idée reçue selon laquelle l’opinion publique caribéenne serait largement favorable à la peine de mort a aussi été battue en brèche par Arif Bulkan, de l’University of the West Indies in Barbados.
Faisant référence à une enquête d’opinion sur la peine de mort automatique à Trinidad, il a remarqué : « Ce que ce sondage fantastique nous montre, c’est que le soutien à la peine de mort dans la Caraïbe n’est pas aussi unanime qu’on le pense habituellement. »
Selon Michael Radelet de l’Université du Colorado, la recherche empirique peut et devrait être utilisée pour développer des arguments contre la peine de mort dans la Caraïbe. Il estime qu’il existe aussi des voies à explorer en donnant la parole aux responsables de la police, aux familles de victimes de meurtres, aux gardiens de prison et à des personnalités de haut rang dans le combat pour l’abolition.
La peine capitale a été importée dans la Caraïbe par les anciennes puissances coloniales (l’Espagne, la France, l’Angleterre et les Pays-Bas). Ce sont ces mêmes pays qui poussent aujourd’hui à l’abolition.
Les participants ont reconnu qu’il s’agissait là d’un sujet sensible.
« La meilleure approche est d’encourager un débat local et de former une opinion locale basée sur des standards internationaux plutôt qu’imposée. C’est le changement politique qui mettra vraiment en place l’abolition de la peine de mort », a expliqué Gregory Delzin, avocat à Trinidad-et-Tobago.
Un consensus s’est dégagé entre les intervenants pour dire que l’abolition dans la région requiert une société civile renforcée pour faire avancer le débat et aider les leaders politiques à avoir le courage et les outils nécessaires à l’abolition de la peine de mort.
A cette fin, les participants ont convenu de développer le Réseau caribéen contre la peine de mort.

Cliquez ici pour visiter le site de la conférence qui contient les enregistrements des discours en espagnol et en anglais ainsi que le texte de la déclaration finale.

Carte: Kmusser

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