Dialogue sur la peine de mort à l’occasion des 20 ans de la Reformasi
Asie
Les 8 et 9 mai 2018 s’est tenue la Conférence nationale : 20 ans de Reformasi : Crime et peine applicable, le discours des Droits de l’Homme à Jakarta en Indonésie, organisée en partenariats par Ensemble Contre la Peine de Mort (ECPM), la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), et l’organisation Anti-Death Penalty Asia Network (ADPAN).
A l’occasion des 20 ans de la Reformasi, période de transition et de réformes soulignant la fin de la dictature depuis 1998, des ONG et des associations représentantes de la société civile locale se sont réunies et ont organisé cette Conférence nationale afin d‘établir un état des lieux précis de l’utilisation de la peine de mort et de son processus en Indonésie.
UN CONTEXTE JURIDIQUE COMPLIQUE
La tenue d’une telle conférence a permis aux acteurs locaux et internationaux de souligner le réel besoin en Indonésie d’une refonte du système judiciaire, notamment au niveau pénal. Cette Conférence a démontré que tout un chacun, avocats, représentants du gouvernement, organisations de la société civile, etc. ont leur mot à dire quant à cette refonte judiciaire, pénale et criminelle.
La réforme du Code pénal reste compliquée et surtout paradoxale. Le gouvernement a en effet décidé que des peines alternatives à la peine de mort seraient désormais possibles. Cependant, alors que des lois de ‘’grâce’’ ont été évoquées, sous conditions très restrictives, les lois spéciales appliquant la peine de mort, qui entourent les crimes liés au terrorisme, aux drogues et à la corruption, semblent affaiblir cette dimension humaine de clémence potentielle.
Le paradoxe et l’incertitude quant au projet de loi sur le nouveau code pénal est palpable entre l’instauration de 15 crimes supplémentaires passibles de la peine de mort, la possibilité d’avoir une période de probation de 10 ans avant l’exécution et la possible commutation de la peine capitale en perpétuité selon les cas au bout de ces 10 ans.
UNE ABSENCE DE REPRESENTATION POLITIQUE
Alors que les exécutions ont repris en 2013, depuis 1 an et demi aucune exécution n’a eu lieu. Une telle conférence aurait pu marquer un premier engagement vers un moratoire officiel. Or, le Ministre de la Justice ne s’est présenté que quelques minutes et a finalement déclaré que cela ne faisait pas partie de ses prérogatives de discuter de la peine de mort dans un tel forum.
Peut-être la candidature de l’Indonésie au Conseil de Sécurité des Nations Unies a-t-elle plus de poids pour instaurer un moratoire sur les exécutions et les condamnations.
UNE SOCIETE CIVILE LOCALE ACTIVE DANS LE BESOIN
Tout au long de cette Conférence nationale, les organisations d’avocats et d’aides juridictionnelles ont été mises à l’honneur. Les formations permettent d’aider ces organisations locales dans leur travail. Cependant le manque de ressources notamment au niveau de l’aide juridictionnelle reste une problématique importante dans le pays.
RECOMMANDATIONS
A l’issue de la clôture de cette Conférence diverses recommandations ont été faites, des engagements politiques forts n’ont pas pu être pris du fait du manque de représentation politique. Cependant, les recommandations suivantes permettront à la société civile et aux organisations concernées de cibler leur travail et leur plaidoyer.
– « Le Ministère de la justice et des droits de l’homme doit fournir de nombreuses contributions et/ou études aux autorités compétentes afin d’instaurer un moratoire officiel sur la peine de mort ;
– Il est important de procéder à une révision du système pénal avant tout ;
– Il est important de fournir des formations aux avocats ‘commerciaux’ afin de créer une diffusion massive pour qu’ils aient des perspectives ‘droits de l’homme’.
– La question de la peine de mort a fait l’objet d’une campagne menée par la société civile, mais elle est encore nécessaire auprès des chefs religieux en raison de la perception du public selon laquelle la peine de mort serait autorisée aux yeux de l’Islam ;
– L’abolition de la peine de mort doit s’accompagner simultanément de réformes du système pénitentiaire ;
– Le secteur académique ne doit pas se limiter à l’étude, la lecture, l’interprétation etc., mais doit aussi renforcer son plaidoyer empirique ;
– Accentuer les études et recherches sur la peine de mort en Indonésie ;
– Les données sur la criminalité en Indonésie doivent être utilisées ;
– Tout un chacun en Indonésie devrait s’interroger sur la position de l’Indonésie dans le domaine de l’abolition de la peine de mort au niveau mondial ? Sommes-nous déjà impliqués dans les recommandations à travers les sessions de l’EPU [Examen Périodique Universel] ?
– Mener une coopération avec la Commission nationale des droits de l’homme ;
– Ce que le gouvernement indonésien doit faire pour supprimer la peine de mort :
1. Diplomatie pour un moratoire
2. leadership et procédure
– Le gouvernement indonésien doit appliquer un moratoire sur la peine de mort pour garantir le droit à la vie des citoyens indonésiens à l’intérieur et à l’extérieur du pays. »
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