Déclaration relative à l’adoption de la 8ème résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies portant sur un moratoire sur l’application de la peine de mort

Déclaration

Publié par Coalition mondiale contre la peine de mort, le 17 décembre 2020

La Coalition mondiale contre la peine de mort félicite chaleureusement l’Assemblée générale des Nations Unies (AGNU) pour l’adoption, à une large majorité de 123 États, de la résolution A/RES/75/183 portant sur un moratoire sur l’application de la peine de mort, le 16 décembre 2020.

Depuis 2007, huit résolutions pour un moratoire sur les exécutions ont été adoptées, avec une augmentation progressive du nombre de votes en faveur, passant de 104 en 2007 à 123 en 2020. A contrario, le nombre d’États dont la législation prévoit encore la peine de mort diminue toujours un peu plus, tout comme le nombre d’États qui continuent à la mettre en application. Seule une petite minorité d’États non abolitionnistes ont mis la peine de mort à exécution en 2019 – 20 au total.

La pandémie de Covid-19 a montré au monde combien la vie humaine était aussi fragile que précieuse. Au cours de cette année, la plupart des gouvernements ont déployé des mesures exceptionnelles pour tenter de contenir la propagation du virus au sein de la population et assurer à tout un chacun et chacune la jouissance du droit à la vie. Les mesures barrières, destinées à protéger des vies, ont parfois été suivies à rebours de leurs intentions initiales dans une poignée d’États où une infraction à la loi est susceptible d’entraîner la mort. Ce défi globalisé, malheureusement, n’a pas empêché d’imposer des condamnations à mort par écrans interposés ni de procéder à des exécutions respectant les règles de distanciation sociale. Plus que jamais, l’exécution d’un individu salit la dignité de toute l’humanité, et nous exhortons les 56 derniers États non abolitionnistes de la planète à respecter l’appel de l’AGNU à suspendre les exécutions.

Le droit à la vie est inhérent à tout individu pour la seule raison de son appartenance à l’humanité, laquelle doit être garantie en toute circonstance et ne saurait dépendre de son statut, de ses choix, de ses comportements ou de ses actes. En ces périodes difficiles, les gouvernements devraient consacrer tous leurs efforts à sauver le plus de vies possibles, et non pas à se raccrocher à un pouvoir, désuet et arbitraire, de vie ou de mort, qui ne saurait en aucun cas constituer un motif raisonnable pour bafouer les droits humains les plus élémentaires.

Cette année s’est ouverte sur une crise sans précédent, mais nous faisons le vœu que cette nouvelle résolution contribuera à ce que 2021 soit une année plus respectueuse de la dignité humaine. La peine capitale n’a jamais pu démontrer qu’elle avait un effet dissuasif particulier ; elle affecte de manière disproportionnée les individus les plus pauvres ; elle est bien souvent un outil de répression politique, à disposition de gouvernements autoritaires à l’encontre des minorités ; elle fait peser un risque considérable de condamner des personnes innocentes à mort, ce que ni commutation, grâce ou procès en appel ne saurait réparer ; elle échoue à remporter le soutien unanime des familles de victimes de meurtre. Une condamnation à mort ne rend hommage ni à la démocratie ni à la justice, deux valeurs auxquelles la communauté internationale est profondément attachée. C’est pourquoi, nous invitons solennellement tous les États qui ont voté en faveur de la résolution mais qui prévoient toujours la peine de mort, à ne pas se limiter à un moratoire de fait sur les exécutions et à prendre toutes les mesures nécessaires pour consacrer, formellement et sans réserve, son abolition en droit.

Les personnes détenues dans le couloir de la mort sont laissées pour compte, oubliées et déshumanisées, alors qu’aucun être humain ne mérite un destin aussi absolu. Il ne fait aucun doute que nous pouvons profiter d’un monde meilleur sans la peine de mort. En abandonnant le recours à la peine de mort en toutes circonstances, une majorité de 106 États membres des Nations Unies ont convenu que l’abolition n’était en rien une faiblesse politique, et qu’aucun bien commun ne saurait éclore d’un système forgé dans la violence et qui prend le risque de décisions irréversibles. Nous appelons, par conséquent, tous les États qui ne l’auraient pas encore fait, à reconsidérer leur application de la peine de mort, à emprunter le chemin de l’abolition mondiale, et à abandonner un châtiment qui trahit ce que nos sociétés méritent le plus – une justice apaisée, pour tous et pour toutes et en tout temps. 

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