La réalité invisible des femmes condamnées à mort mise en lumière lors de la 19ème Journée mondiale contre la peine de mort
Journée mondiale
Avec pour thème « Femmes condamnées à mort : une réalité invisible », la 19ème Journée mondiale contre la peine de mort avait pour objectif de mettre en lumière les problématiques que rencontrent les femmes condamnées à mort, exécutées, graciées ou encore reconnues innocentes.
Les femmes confrontées à la peine de mort sont pour la plupart exposées à des discriminations fondées sur le genre mais aussi à des discriminations basées sur d’autres éléments d’identité tels que l’âge, l’orientation sexuelle ou l’origine ethnique. Ces discriminations croisées peuvent lourdement peser sur la détermination de la peine, notamment lorsque le comportement de ces femmes ne correspond pas aux normes sociales imposées à leur genre ou que des circonstances atténuantes essentielles, telles que des violences sexuelles et sexistes, ne sont pas prises en compte.
A l’occasion de la Journée mondiale, de nombreux acteur·e·s du mouvement abolitionnistes mondial se sont mobilisé·e·s en publiant des rapports et études sur les femmes condamnées à mort afin d’approfondir les connaissances sur ce sujet, en organisant des actions éducatives et culturelles pour sensibiliser à ce sujet et en prenant position pour l’abolition de la peine de mort. Cet article présente un échantillon des centaines d’événements qui ont été organisés pour cette célébration.
Asie et Moyen-Orient : informer sur les femmes condamnées à mort par la culture et la recherche
Au Pakistan, la culture a été mise à profit pour sensibiliser à la thématique de la peine de mort. Justice Project Pakistan a lancé la campagne digitale « This is (not) a Game » qui invite le public à adopter le point de vue d’une femme faisant face à la condamnation à mort de son mari. Dans le cadre de cette campagne, un jeu en ligne a été conçu et des représentations théâtrales interactives ont été organisées dans plusieurs villes du pays. La Commission des droits de l’Homme du Pakistan a également organisé une représentation théâtrale sur l’inviolabilité du droit à la vie et a pris position contre la peine de mort dans une déclaration publiée pour la Journée mondiale.
En Iran, le centre Abdorrahman Boroumand, en collaboration avec Monash University et Eleos Justice, a publié deux interviews de Narges Mohammadi sur la peine de mort dans le pays (disponibles ici et ici). Iran Human Rights a consacré l’étude “Women and the Death Penalty in Iran: a 12 Year Analysis” à la situation des femmes condamnées à mort dans le pays.
En Indonésie, l’Institute for Criminal Justice Reform s’est également saisie de cette journée mondiale pour documenter la situation de la minorité au sein de la population carcérale que constituent les femmes condamnées à mort. Le rapport « The Overlooked, She in the Vortex of Death Penalty” sur la situation des femmes condamnées à mort a ainsi été publié pour la Journée mondiale et présenté au cours d’un webinaire. LBH Masyarakat a organisé un webinaire consacré aux femmes migrantes confrontées à la peine de mort en Indonésie.
Afrique : sensibiliser des groupes cibles à la thématique de la peine de mort
Dans plusieurs pays, des organisations abolitionnistes ont organisé des activités visant à sensibiliser et outiller différents groupes de la population. Au Sierra Leone, Society for Human Rights and Development Organization a ainsi organisé des activités dans plusieurs écoles de Freetown afin de sensibiliser les élèves à la peine de mort. Au Cameroun, Droits et Paix a convié les avocat·e·s de femmes passibles de la peine de mort à un atelier de réflexion et de sensibilisation aux problématiques spécifiques de ces femmes. Au Nigeria, Legal Defence (LEDAP) and Assistance Project et Human Rights Law Center (HURILAWS) ont organisé un atelier destiné aux journalistes afin de les informer sur la situation des personnes condamnées à mort et sur la nécessité d’abolir la peine capitale.
Au Maroc, l’exposition Le droit de vivre, qui regroupe les œuvres de treize artistes plasticien·ne·s marocain·e·s, a été inaugurée au Musée d’art et de culture de Marrakech et un ouvrage également intitulé Le droit de vivre a été publié. Cet ouvrage regroupe les textes de trente-sept écrivain·e·s et intellectuel·le·s marocain·e·s défendant l’abolition de la peine de mort au Maroc et les reproductions des œuvres présentées dans l’exposition.
Amérique : témoigner et documenter la question des femmes condamnées à mort
Aux États-Unis, plusieurs organisations ont invité des femmes condamnées à mort à témoigner afin de mettre en lumière leurs histoire et sensibiliser sur la problématique des femmes condamnées à mort. Death Penalty Focus a ainsi organisé un webinaire sur les femmes condamnées à mort au cours duquel Sabrina Butler-Smith, Sunny Jacobs et Debra Milke, trois femmes qui ont passé plusieurs années dans les couloirs de la mort, ont témoigné. Witness to Innocence a invité Sabrina Butler-Smith à partager son histoire lors d’un webinaire organisé à l’occasion de la sortie du film « It Could Happen To You ».
Aux Caraïbes, Greater Caribbean for Life a échangé des discriminations et inégalités dont sont victimes les femmes condamnées à mort au cours d’un webinaire. L’organisation a également participé à plusieurs émissions de radio afin de sensibiliser à cette thématique.
Enfin le Cornell Center on the Death Penalty Worldwide a publié plusieurs études, notamment le rapport « No One Believed Me: A Global Overview of Women Facing the Death Penalty for Drug Offenses » rédigé avec Harm Reduction International sur les femmes condamnées à mort pour des infractions liées à la drogue. La publication de ce rapport a également fait l’objet d’un événement parallèle lors de la 48ème session du conseil des droits de l’homme.
Dans les médias, prendre position contre la peine de mort
La mobilisation pour la 19ème Journée mondiale a également pris place dans les médias. Sur les réseaux sociaux, plusieurs milliers de personnes et d’organisations de tous horizons ont pris position contre la peine de mort et ont exprimé leur soutien à la cause abolitionniste avec le hashtag #NoDeathPenalty. La Coalition mondiale a mené une campagne de 10 jours sur Twitter, Facebook et Instagram afin de présenter les enjeux du thème « Femmes condamnées à mort : une réalité invisible ».
Plusieurs institutions nationales des droits humains, tel que la Commission nationale des droits humains du Mexique et la Commission des droits humains des Philippines, ont déclaré leur opposition à la peine de mort dans des déclarations publié à l’occasion de la Journée mondiale. Les ambassadeur·drice·s des droits humains de onze États européens ont également rendu publique une déclaration commune à cette occasion. Dans une déclaration conjointe, l’Union européenne et le Conseil de l’Europe ont réitéré leur prise de position contre la peine de mort et leur engagement en faveur de l’abolition de la peine de mort. Le groupe de travail sur la Peine de mort et les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires en Afrique de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a publié une déclaration consacrée au thème de la Journée mondiale et à la situation de la peine de mort dans les États parties à la CADHP. Plusieurs États abolitionnistes, tel que l’Australie, la Canada, la Belgique, la France, l’Allemagne, la Slovénie et l’Italie ont rappelé leur engagement en faveur de l’abolition de la peine de mort.
photo: Journalistes participants à l’atelier de sensibilisation organisés à Lagos. © LEDAP, HURILAWS